Pierre BRANDAO, SES ROMANS POLICIERS
COMMANDE
L'ENLÈVEMENT est disponible sur commande. Il vous suffit d'imprimer le deuxième volet du bulletin joint et de suivre les consignes. En cas de difficultés, contacter Pierre Brandao : 06.23.53.30.18
INTRODUCTION
Découvrez Isabelle Loubry, héroïne de ces romans policiers. Gendarme, elle mène différentes enquêtes criminelles qui permettront au lecteur de voyager dans plusieurs contrées de France (notamment la Saintonge, l'Aunis, la Vendée, la Réunion, la Bretagne, mais également le Québec, l'Inde, la Belgique...)
Outre la volonté de conduire l'intrigue jusqu'à sa fin, de manière à ménager le suspens -et les nerfs !-, la particularité de ces romans provient du sens profond de l'engagement humain dont l'héroïne fait preuve au fil des pages. Cela la rend attachante, agréable, mais surtout, efficace !
Bonne lecture !
L'ENLÈVEMENT
Après Meurtres à la micro-carte, la gendarme Isabelle Loubry doit beaucoup prendre sur elle pour accepter de pardonner au genre humain. Cependant, elle aussi doit rendre des comptes auprès d’une hiérarchie fidèle à ses principes de transparence et d’honnêteté.
Mais lorsque l’un des plus hauts ténors de l’institution l’invite à accepter une mission particulièrement sensible, elle est loin de s’imaginer dans quel monde elle allait plonger.
Et quand s’ajoute à ce challenge une affaire d’enlèvement qui la touchera en plein coeur, ses convictions s’opposeront au principe même qui régit toute personne sur Terre : l’Amour !
De Charente-Maritime en Bretagne, suivez cette héroïne et tentez de percer l’obscurantisme qui confronte toujours les éléments du bien à ceux du mal !
EXTRAIT CHAPITRE 1
CHAPITRE 1
Vendredi 27 mars 2015, dans l’après-midi,
quelque part…
Un frisson secoue la jeune femme… De froid ? Elle ne sait pas trop, mais il est tellement désagréable qu’elle sort de sa torpeur. Elle se retrouve en position fœtale, coincée entre plusieurs parois recouvertes de moquette. Ses jambes pliées ne peuvent se détendre, ses genoux lui font mal. Ses bras ankylosés semblent avoir figé ses articulations. Qu’est-ce que c’est que ça ? Des lanières noires, des… – comment appelle-t-on cela déjà ? Des Serflex ? Oui, c’est le mot... – lui entravent les poignets. Ses yeux, à demi-fermés, percent avec peine son environnement. L’endroit, exigu, ressemble à une grosse malle. Sombre. Aucune lumière. Comme dans un cachot. Serait-elle… prisonnière ? Face à elle, son sac de voyage traîne, inutile.
Elle tente d’humecter ses lèvres, sans succès. Elles ont un goût infect, un goût de médicament qui lui colle aux voies respiratoires, descend dans sa gorge… Elle ne comprend pas, ou plutôt si, trop bien même. Son cœur bat plus fort, surtout lorsqu’elle s’aperçoit qu’un scotch recouvre sa bouche, lui interdisant d’émettre le moindre son. Le produit douceâtre, du chloroforme ? Pourquoi l’a-t-on enlevée ?
À ce moment, un violent soubresaut lui arrache un cri, étouffé par son bâillon. La recluse se réveille complètement. Une crampe horrible s’empare de ses deux jambes, elle panique. Un deuxième cahot intervient, fait sauter son corps, lui cogne la tête. Alors, elle comprend : quelqu’un la transporte dans le coffre d’une voiture !
Les souvenirs affluent… l’agression sur la route, à trois quarts d’heure de sa destination. L’intrusion, la violence, la rapidité de l’attaque, l’évanouissement… Tout cela lui revient peu à peu…
L’horreur : qu’y a-t-il de pire que d’être la victime d’un enlèvement, quand bien même on en ignore les causes et on en craint les conséquences ?
Il faut se concentrer, rester calme, appliquer les conseils prodigués par ses parents : en cas de situation extrême, maîtriser sa respiration, oxygéner son cerveau et la solution s’imposera d’elle-même. Ah ! Facile à dire ! Tenter de s’échapper ? Mais pour aller où ? Elle ne connaît pas la direction empruntée par ses kidnappeurs. Attachée et bâillonnée, comment pourrait-elle sortir d’une voiture en plein mouvement, sans risquer de se tuer ?
Depuis combien de minutes s’est-elle réveillée ? Combien de kilomètres ont été parcourus durant son inconscience ? L’engin roule sans saccades désormais, signe que le chauffeur a pris une voie rapide, peut-être l’autoroute ? La jeune femme n’a aucune idée de l’heure ni du temps qu’il fait dehors, s’il fait jour, s’il fait nuit… Elle ne comprend pas… Elle reste immobile, prostrée, l’inquiétude annihile toutes ses facultés. Elle est paralysée de peur, se sait à la merci du conducteur… Est-il seul ? Non… ils étaient deux… Bien silencieux d’ailleurs, elle n’entend aucune voix devant. Des maniaques ? Des pervers sexuels qui, une fois leurs fantasmes assouvis, se débarrasseront d’elle comme on jette un résidu à la poubelle ? Des larmes coulent, le cœur bat trop fort, ses mains tremblent sans discontinuer… Bon sang, où se trouve sa planche de salut, s’il y en a une ?
QUELLE TUILE !
Quinze jours…
Avant de permettre au chef Hérart de goûter un nouvel horizon appelé retraite…
Avant d’autoriser Jonathan Planquart, en stage d’immersion en brigade territoriale, à rejoindre l’école de formation de Montluçon…
Mais le destin s’en mêle, obligeant l’ancien et le jeune à tenter d’élucider une série de meurtres commis à l’encontre de vieilles personnes habitant sur l’île d’Oléron. Pourquoi diable leur en veut-on, elles dont la préoccupation première consiste à passer le temps entre bière et jeux de société ?
Hérart a beau le répéter : une sacrée tuile qui leur arrive là ! Lui qui goûtait d’avance au plaisir du farniente ne pouvait pas dire mieux !
Extrait Prologue
UNE BALADE MÉMORABLE
Mardi 12 août 2014, 8 heures
Quelque part sur le littoral charentais
Flâner dans ce charmant village situé sur l’île d’Oléron, en Charente-Maritime, s’apparente à un vrai moment d’évasion pur. Des maisons basses à la façade blanche et aux frontons fiers se dressent devant le visiteur soucieux de dépaysement. Les volets bleus et les courettes baignées de lumière enchantent, les axes principaux sont aussi larges que les venelles sont étroites, les commerces vivent au gré des saisons touristiques et la proximité de l’Atlantique respire bon les vacances. Auguste Naud, un insulaire, goûte à ces congés spéciaux, offerts par sa retraite de marin et d’ostréiculteur. Il déambule avec sa baguette et ses croissants, achetés dans la boulangerie de la rue Semard et prend le chemin le conduisant à son domicile.
Auguste Naud, soixante-quatorze ans, un caractère très terrien, forgé par l’âpreté du travail en mer ! Il demeure seul depuis toujours, dans une de ces habitations, un peu à l’écart de la commune, face à la grande étendue maritime. Oh ! Il n’a pas toujours connu l’isolement, le brave homme ! Mais son amour de jeunesse a préféré l’abandonner sur cette île pour rejoindre un Québécois riche et fortuné… Alors, les femmes, mieux vaut ne pas trop lui en parler ! Il aime ces promenades, accompagné de ses pensées. Lorsqu’on goûte la chance d’être propriétaire à côté de l’océan, on profite du moindre soupçon d’iode ! Pour se rendre chez lui, il faut emprunter le chemin du Râteau qui longe le littoral pour apercevoir sa maison, sur votre gauche. Mais qu’importe son logis ; l’essentiel réside plutôt en cette journée particulière qu’il n’oubliera pas de sitôt.
Tout d’abord, déposer la casquette sur la patère de l’entrée, s’installer devant son café, savourer les viennoiseries, apprécier le moment. Se lever, piquer une cacahuète dans le pot, narguer le perroquet pour la lui remettre tout de même à travers les grilles de la cage. L’entendre répéter « cacahuète… rhôooo… », suivi de son sifflement aigu « uil… uil… », le flatter, appliquer le « baiser » rituel et reprendre son couvre-chef pour la balade le long de la côte. Cela, il ne le manquerait pour rien au monde ! Rien d’anodin dans cet exercice : chaque sortie lui amène son lot de découvertes et sa cour en regorge : coquillages pittoresques, bois mort flotté aux allures d’extraterrestres ou de fantômes, algues originales, cadavres de poissons échoués sur la berge... Les marées lui apportent régulièrement un présent que son regard perpétuellement neuf lui permet d’apprécier.
Il referme la porte derrière lui et s’engage sur le chemin des dunes. Des barbelés, placés à mi-hauteur des monticules, empêchent les intrus de débarquer de l’autre côté. Il devrait contourner l’obstacle sur une longue distance pour se retrouver là où il le souhaitait, mais lorsqu’on habite face à la mer, l’envie de contourner le règlement vient naturellement. La police municipale de Saint-Georges ne commencerait pas sa tournée avant au moins neuf heures trente... D’ici là, il serait revenu. Il grimpe, ne prête pas attention au sable inondant ses chaussures et son regard se porte en premier lieu sur l’horizon. Beau ciel bleu, pour ce milieu d’été orageux ! Il jette un œil de droite à gauche, contemple les vestiges abandonnés par le ressac. Rien de bien important ce matin, qui vaille la peine de s’y intéresser. En contrebas, il remarque une forme oblongue repliée sur elle-même. Il se souvient du journal de la veille, qui rapportait l’échouage d’un phoque sur les plages charentaises. Comment agir, dans ce genre de situation ? Ah oui ! Aviser l’Aquarium de La Rochelle, qui enverrait une équipe. À deux mètres de la dépouille, Auguste s’arrête net. Il n’a jamais vu de mammifère marin accoutré comme un être humain : portant veste et pantalon...
— Bon sang, fallait que ça tombe sur moi !
Il s’approche, retourne le visage du noyé et s’exclame :
— Eh merde ! C’est Justin !
MEURTRES À LA MICROCARTE
Laissons la parole à Jocelyn Maily, l'auteur de Loozana Blues, et membre du comité de lecture d'Edi'lybris... *** Elle croyait avoir tout vu.
*** À Port-d'Envaux, en Charente-Maritime, les carrières de calcaire s'offrent aux doigts experts de sculpteurs de pierre. L'un d'eux rencontre l'édile du coin, un député. Discrètement, il lui confie une micro-carte, mais celle-ci tombe sans qu'aucun des deux hommes s'en aperçoive. Dans l'assistance, un hacker a tout vu. Il subtilise l'objet, rentre chez lui et se précipite sur son ordinateur. Le lendemain, on le retrouve mort sur sa table de travail... Le moniteur est allumé : une invite exige un mot de passe, mais personne ne le connaît... |
Extrait prologue
L’ENTERREMENT
Cimetière Saint-Éloi, La Rochelle,
lundi 16 février 2015, 10 h 00.
En ce milieu de matinée de février 2015, deux à trois cents personnes se rassemblaient autour d’une tombe du cimetière Saint-Éloi à La Rochelle. Triste et pluvieux, le temps était de circonstance, pour accompagner les femmes et les hommes présents. Beaucoup de regards bas, d’yeux humides, de frissons provoqués par la peine et le froid. Beaucoup d’incompréhension aussi… Dans ce cercueil veillé par les assistants funéraires, un cœur avait battu, une âme avait vécu, une vie en avait entraîné d’autres sur les chemins de la joie, du bonheur et de la recherche de la vérité. On juge parfois l’étendue de l’aura d’un être humain au nombre de personnes venues lui rendre un dernier hommage. Ils étaient une multitude pour la circonstance… Dans les allées contiguës, d’autres gens arrivaient, la mine accablée, la démarche lourde. Des curieux aussi, de tous âges, de tous sexes, de toutes origines et de tous horizons. Bien sûr, les gendarmes avaient revêtu leur uniforme d’apparat pour rendre honneur à la défunte, ce qui expliquait ces notes bleu foncé disséminées un peu partout dans la foule. Des civils, rencontrés au gré de précédentes intrigues criminelles, avaient fait le dépla-cement : Aurore Martin, l’assistante légiste d’Auxerre, victime d’un malentendu qui aurait pu lui coûter la liberté ; Stéphane Desfougères, le chef clown, accompagné de sa femme, échappé par miracle d'un sort peu enviable ; Dominique Toirne, l’énigmatique femme au passé douloureux, prête à souffrir les ténèbres plutôt que la lumière ; Jean-Luc Roman, rencontré à l’occasion d’une histoire à tourner en rond. Bien d’autres personnalités encore, qui à un moment de leur existence, furent séduites par la personnalité attachante de l’être gisant près d’eux.
Mais le chagrin et la douleur de la famille, surtout, déchiraient les cœurs : William tenait à chaque main ses deux ados devenus jeunes adultes. Même s’ils conservaient une droiture exemplaire, les larmes d’Aurélia et de Jonathan trahissaient leur émotion… Le trou béant accueillera bientôt le cercueil de celle qui sut leur apporter amour, réconfort, tendresse. Pourtant, ces deux-là ressentaient du dépit… Durant les sept dernières années, leur mère privilégia son profil de carrière plutôt que la famille ; ainsi, absente au quotidien, elle se contentait des jours de repos et de permissions pour profiter de la vie ensemble. Alors, à quoi bon ce sacrifice, puisqu’on en était arrivé là !
Un peu à l’écart, Pascal Duvivier, le technicien en identification criminelle du groupement de gendarmerie de la Charente-Maritime, s’entretenait discrètement avec le capitaine Rouger, nouveau commandant de la compagnie de La Rochelle ayant remplacé le capitaine Andret, parti à la retraite le vendredi précédent.
– Alors, chef, demanda l’officier à voix basse, rien qui puisse nous mettre sur une piste ?
– J’ai examiné ses dernières notes, mais j’avoue ne pas y comprendre grand-chose. Isabelle n’avait mis personne au courant de ses investigations… À vrai dire, elle ne semble pas en avoir eu le temps… Peut-être Desfougères en sait-il plus que nous, mais depuis le drame, il est effondré…
–– Tout ça pour une vidéo ?
–– En fait, on ne sait pas trop ! Ce peut être un film, un fichier Excel, un document Word, ou autre ! Cette microcarte SD renferme un secret que personne n’a réussi à percer !
–– A-t-on mis un dispositif de surveillance en place aujourd’hui ?
–– Oui, aux quatre coins du… On en reparlera un peu plus tard, si vous voulez bien…
–– Dès notre retour au bureau, nous prendrons une décision radicale : recommencer l’enquête à zéro et permettre aux nouveaux enquêteurs ce qu’il n’a pas été possible de faire jusqu’à maintenant… Taisons-nous… Le prêtre vient de lancer une rose sur le cercueil… Nous allons suivre la procession…
Longue et douloureuse. À l’image des mines tristes de ceux qui firent le déplacement. Rarement cimetière ne connut une population vivante piétinant si péniblement les allées fleuries. À l’issue de la cérémonie, les visiteurs quittèrent le lieu de recueillement et se dirigèrent vers leurs véhicules. La vie reprit ses droits, tandis qu’une âme rejoignait les cieux.
L’épitaphe sobre résumait sa vie.
Isabelle LOUBRY
40 ans- Majore de gendarmerie à titre posthume
Née le 1er mai 1971 – décédée le 13.02.2015.
La flamme de la vérité qui l’animait a fini par l’éteindre.
LES RONDS-POINTS DE LA COLÈRE
Au hasard des routes, le regard se pose négligemment sur les aménagements de certains ronds-points… En Charente-Maritime, plusieurs d’entre eux aiguisent notre curiosité… Ainsi, deux impressionnantes mains s’apprêtent à ouvrir une huître à l’Éguille-sur-Seudre, un groupe de
pèlerins en composite se dirige vers l’hospice de Pons, une phénoménale statue de fer répondant au nom d’Hermès accueille les voyageurs en provenance de Marans, un gigantesque terre-plein central accueille une baraque ostréicole près de Chaillevette… Et bien d’autres encore valent le détour.
Mais, lorsque ces ornements cachent de lourds secrets, conduisant notre héroïne gendarme Isabelle Loubry à solliciter un détective outre-Atlantique, notre compassion dépassera-t-elle le seuil de l’étonnement et de l’admiration ?
Qui a intérêt à cacher ces fardeaux plutôt morbides ?
De giratoires en giratoires, les enquêteurs vont connaître le summum de l’horreur, tout en se mettant en quête de motards au présent particulièrement douteux…
Entrez dans la ronde, brave gens, et que la tête ne vous tourne pas trop, car cette enquête vous mettra sens dessus-dessous !
EXTRAIT CHAPITRE 2
nuit du lundi 12 avril 2010 – 00H45 Du haut de ses dix-sept printemps, un physique de déesse, Astrill savait jouer de son pouvoir de séduction. Ses cheveux, longues nouilles chinoises tortillées et colorées dans un charbon maintes fois passé au ras du feu, descendaient jusqu’à ses épaules, tandis que quelques mèches rebelles écarlates balayaient son front haut et délicat. Son regard, souligné par un mascara aussi foncé que sa teinture, coïncidait parfaitement avec le noir épousant ses lèvres de jeune femme. Dotée d’une poitrine déjà bien proéminente pour son âge, la demoiselle savait mettre en valeur sa féminité… Elle s’en servait pour exacerber le désir de l’homme… Astrill portait un chemisier à manches courtes, aux couleurs chamarrées, bien échancré — peut-être un peu trop pour la décence de l’époque ! —. Pour couvrir ses jambes, une mini-jupe charmait d’érotisme l’atmosphère friponne de la soirée. *** |
ÉCART DE MÉMOIRE
Quel lien existe-t-il entre un commissaire parisien à la recherche d’une femme accidentée, mystérieusement disparue d’un hôpital, une prostituée septuagénaire qui officie sur un parking proche du littoral charentais, un cambrioleur infect qui défie les forces de gendarmerie de La Rochelle, et le passé trouble d’un notable occis dans une maison au fin fond du Jonzacais ?
Isabelle Loubry devra se méfier de ses certitudes, surtout quand apparaît un journal intime écrit avec le noir des vicissitudes, le pourpre des passions criminelles, le gris de la fange humaine.
Cette histoire relate l’existence réelle d’une enfant martyre à une fiction policière. Elle ne laissera pas le lecteur indifférent, car une question demeure après avoir refermé la dernière page : à quel point sommes-nous tributaires des autres pour mener notre propre destin ?
EXTRAIT
Préambule de la première partie
La lumière me fait mal ! Et, pourtant, l'éclat de mes prunelles, sous des paupières à demi fermées, s'habille d'une pâleur effroyable… Alors, un cri bizarre déchire la nuit... mon cri ? Strident, répétitif, alarmant, que nul ne semble entendre... Le froid m'entoure, le vent me gifle, la rue m'oppresse... Je ne vois rien, pas encore assez, juste ce disque blafard, fondu sur un écran d'étoiles... Je perçois des sons rassurants, un geste calme me recouvre d'une veste rêche, censée protéger ma nudité et nettoyer ma peau trempée de sang et de liquide amniotique. J’étais si bien dans mon antre lymphatique, baignant dans l’insouciance de la chair maternelle… Et me voilà allongée sur un ventre maigre, presque flasque, affaibli, un ventre dont je découvre l'envers, supportant les mêmes épreuves que les miennes : froidure, solitude, incertitude... le tout auréolé de réverbères agressifs... Ah, enfin ! Un peu de chaleur émane d'un mamelon doux et humide, mes doigts se dégourdissent, attrapent la colline pleine de promesses et mes lèvres goûtent goulûment au lait si agréable et si chaud. Mon souffle s'apaise, la faim s’estompe et je me surprends à la gloutonnerie, dans l’insolente indifférence d’une avenue célèbre de Paris.
À nos côtés, un personnage d’allure imposante bouge dans tous les sens. Il se prend la tête à deux mains, comme s’il voulait assurer le lien entre son esprit et son corps… Ses râles, gargarismes aigus qui m'interpellent dans un chant de sirènes plaintif, se propagent en toutes directions… Veut-il l'univers à son écoute, le monde à son agonie, le pays à sa souffrance, Paris à ses pieds ? Les oreilles naissent en chaque chose, affirmait-il, l’œil tourné vers les murs de la ville… Il me sera bien utile de le savoir ! Que de tremblements et d’impuissances dans sa voix rauque ! Que d’énergie puisant sa source dans le désespoir ! Les oreilles naissent en chaque chose, les oreilles naissent en chaque chose ! Oui ! Oui ! Mais pourquoi gesticuler, pourquoi parsemer sa raison aux rigoles du macadam ? Je ne comprends pas son silence soudain, mais moi, je m'en moque, car je suis préoccupée par ce téton offert qui me réchauffe… J’aime la chaleur de cette poitrine qui me berce ; j’apprécie vraiment le lait maternel… Alors, dans une paix retrouvée, je me désintéresse complètement de lui, qui en temps normal aurait dû s'appeler "père"…
Certains passants prononcent quelques mots dont les derniers signifient le pire : « il fait une crise de faux lit ». J’ai du mal à m’imaginer ce qu’est un « faux lit », mais apparemment c’est grave. Assez pour expliquer que par la suite, plus jamais je ne le vis ni n’entendis parler de lui, trop souvent sujet à la panique en de pareilles circonstances ! Panique… Ce mot me frappe, martèle mon esprit, perturbe mon existence de petite fille ! Puis des globes aveuglants surgissent d’un monstre énorme en acier et arrivent droit sur nous… J'ai peur ! Mon cœur bat la chamade, s'affole… L'instinct de survie ? Cela s'arrête très près de moi, souffle une fumée âcre et immonde... Je tousse, je pleure, je crie ! Enfin, il se retient de cracher, comme s'il avait la faculté de ne plus respirer ! Il ferme même ses yeux jaunes... Il n'émet plus de bruit également ! Ses bouches latérales s'ouvrent sur d'étranges êtres en blanc...
Le mélange de paroles douces me rassure, les gestes s’appliquent avec beaucoup d’attention, avec tendresse. On me soulève, me recroqueville au creux d'une épaule, m'emmène dans l'antre de fer... J'entrevois ma mère, portée délicatement sur une civière par des blouses immaculées... Ils la transportent aussi au chaud, avec moi… Elle en profite pour me toucher. L’un des hommes, en rouge et bleu celui-là, me pose entre ses bras. Elle me prend la main et me sourit comme il n’est pas permis ! Cela ne s’adresse pas à moi mais plutôt au vide sidéral ; c'est un sourire dont la béatitude annonce déjà l’absence… À moins que ce ne soit le contraire : trop de sensations qui s'entrechoquent en moi ! Les oreilles naissent en chaque chose… Comment comprendre, moi qui n’ai pas demandé à naître !?
Alors, je me rends compte qu'il fait bon à l'intérieur de l'engin, bien meilleur qu’à l’endroit hostile où j'ai ouvert pour la toute première fois mes pupilles de nouveau-née...
« Bienvenue dans ce monde de brutes, belle enfant ». L'infirmière avait certainement un don de prédiction... La première brute de ma vie, c'était la vie elle-même...
QUAI DES CICATRICES
Qu’il est bon de passer ses vacances à La Rochelle ! Isabelle et William attendaient ce moment avec impatience : finies les procédures criminelles pour l’une, et le travail des chevaux pour l’autre ! Farniente, bronzage et promenades constituent leur emploi du temps pour la semaine à venir.
De plus, lorsque leur séjour s’agrémente d’une retrouvaille sympathique en la personne d’un gendarme rochelais, tous les ingrédients sont réunis pour que ces congés soient le plus mémorable possible…
Pour l’être, ils le sont… Une série d’assassinats sur les quais de La Rochelle a lieu, à l’encontre de mendiants… Et Isabelle s’aperçoit qu’un loup se cache dans la bergerie…
Commence alors une course poursuite contre le temps pour découvrir le responsable de cette sombre machination, afin que l’amitié et la confiance demeurent pleines et indivisibles !
Qu’il est bon de passer ses vacances à La Rochelle ! Mais Isabelle regardera d’un autre œil ses quais, dont la cicatrice ne se referme jamais lorsqu’elle est synonyme de douleur…
EXTRAIT DU CHAPITRE 1
La Rochelle,
Lundi 25 août 2003, 05H00
Quel âge pouvait-il avoir ? En avait-il un ? Sa face burinée par le blafard des miroirs d'antan se recouvrait de la poussière nocturne, tandis qu’une couche de crasse dissimulait sa morosité latente… Il n'osait plus, depuis longtemps, contempler son reflet… Qu'imaginait-il, seul, égaré dans l'immense drap noir où les étoiles nourrissaient le clapotis de son amère existence ? Il déboucha sur l’intersection de la rue de l’Arsenal et du Quai Maubec, avec l’idée de prendre la direction du parc animalier où ses compagnons de misère l'attendaient. Le chemin s’étirait comme un carambar ramolli qu’un gosse sortirait de sa bouche en l’allongeant malicieusement ; il s’annonçait interminable, tant son état éthylique l’abrutissait ! Même Tombouctou lui paraissait plus proche ! Combien de kilomètres devrait-il parcourir encore ? D’abord le Cours des Dames, ensuite la tour Saint-Nicolas, le grand parking Saint-Jean-d’Acre et la belle forteresse des Quatre Sergents. Enfin, il emprunterait les espaces verts et se dirigerait vers le petit jardin zoologique.
Dans un monde où le réel côtoyait le brouillard de son ivresse, il déambulait ainsi, le regard perdu, l’œil aux rivières veineuses et les pensées mortes calfeutrées dans l’illusion. Chaque pas en avant le déséquilibrait et il parvenait, presque miraculeusement, à rester sur ses jambes et à éviter de se vautrer lamentablement sur le pavé. Quelques lueurs - éphémères traits d’esprit vite anéantis par les vapeurs vineuses - l'invitaient à ne pas divaguer sur la route ; il y percevait la folie des chauffards du petit matin s'amusant au nez et à la barbe des policiers blasés. Malgré le dépérissement d'un corps tombant en loques, « Vieux Loup » s’accrochait à son passé. Aujourd’hui, vivre se résumait à partager les bouteilles de whisky, notamment celle qu’il cramponnait dans sa main. Il avait promis à ses frères d’infortune de la vider avec eux ; par ces temps de canicule, un peu d’entraide rafraîchirait les cœurs des mal nantis ! Mais il fallait attendre pour ne pas susciter les convoitises d'autres mendiants assoiffés. Aussi avaient-ils convenu d’attendre l’aurore, seul instant propice pour des retrouvailles tranquilles. Propice parce que la brume donnait au parc l’apparence d'un monde fantasmagorique, où mystère et réelle solitude se rejoignaient ; propice pour chasser leurs angoisses en prenant une bonne lampée de feu jaune.
Un rictus proche du sourire creusa ses rides d’ancien marin. Il songea au billet récolté l'après-midi, généreusement offert par un « bourgeois » qui s’était amusé à l’apostropher d’une tirade facile empreinte d'hypocrisie et de pitié : « Faites-en bon usage, mon brave. » En quoi ça le regardait ? Ce bourge’ pouvait donner ce qu'il voulait, mais des conseils moralisateurs sûrement pas ! Savait-il à qui il avait affaire, pour s’arroger le droit de dispenser des commentaires à la limite de l'humiliation ? À lui ? Lui qui, trente ans auparavant, naviguait sur les océans du globe ? Oh, il est vrai … Cela n'avait pas duré… Cette fichue maladie l'avait injustement jeté à terre et par la suite, le spectre de la déchéance l’avait happé pour l’habiter à tout jamais… Pourtant, comme l'équipage se glorifiait de saluer un tel chef ! Hardi, les gars ! Les harengs et les thons rendront leurs vieilles arêtes ! La pêche assurera votre fortune ! Voyez à Chef de Baie, ce bon vieux port, votre retour tant attendu ! Ah ! Belle nostalgie de cette époque où il ne gardait plus que l'amère magie de ses voyages tropicaux ! Comme il appréciait le respect des autochtones qui l’accueillaient, craintifs et obéissants ! Comme les derniers vestiges de ce passé révolu, « Vieux Loup » était chaussé de ses vieilles bottes bleues en caoutchouc recouvrant le bas de son pantalon ciré jaune ; un pull marin orné d'une ancre le protégeait des frimas tandis qu’une casquette blanche et bleue finissait d’asseoir son autorité sur le petit monde qui l’entourait… Il n’imaginait même pas les sourires narquois des badauds à le trouver vêtu de la sorte !
Il se plaisait dans son monde imaginaire, habité de peuplades sauvages dont il se proclamait roi, servi par des femmes attentives au moindre de ses désirs, adoré par des hommes puérils et entièrement dévoués ! Alors, qu’un « bourgeois » lui fasse la leçon ? Ça, non ! Jamais ! Jamais il n’accepterait de recevoir en pleine face la vérité de son déclin ! Un inconnu ne le musellerait pas, non ! Sûrement un touriste attardé, qui croyait se rendre intéressant. « Vieux Loup » ne se laisserait pas insulter, non mais ! Le mépris ? Un terme absent de son vocabulaire. Les quelques invectives proférées à l’encontre du donateur le firent vite déguerpir ! « Vieux Loup », un surnom bien mérité, bon sang ! Il en avait fallu des années pour assortir cette moustache et cette barbe avec le franc-parler qui lui était propre ! Malgré l’année passée derrière les barreaux, son clapet s’exprimait toujours aussi bien, alors un estivant de pacotille… Pensez donc ! Un peu de considération, tout de même !
L'ASSASSIN DU PREMIER MAI
1er mai 1997. Isabelle Loubry, notre héroïne gendarme, est chargée d’enquêter sur le meurtre d’une religieuse tuée durant la nuit près de la basilique de Vézelay.
Un crime crapuleux ? Pourtant, d’autres événements commis dans les mêmes circonstances la conduiront dans plusieurs villes de France (Poitiers, Bégard, Périgueux, La Rochelle, Marsilly, Paris…) et en Inde. De villes en villages, elle suivra le fil poétique -mais oh combien machiavélique !- d’un serial killer qui sévit chaque 1er mai et qui, une fois son forfait accompli, dépose sur le corps des victimes des phrases étranges et un brin de muguet. Isabelle, humaine et révoltée, se sent proche de ces pauvres femmes assassinées… Sait-elle déjà jusqu’à quel point ?
Suivez à bout de souffle l’héroïne dans cette enquête où vengeance, violence, suspense, poésie et spirituel se côtoient au fil des pages. Peut-être vous poserez-vous cette question au moment où vous fermerez l’ouvrage : mon passé est-il sans tache ?
à noter :
« L'Assassin du premier mai » a été présenté en 2005 au concours littéraire de la gendarmerie et a terminé en sélection finale. L'originalité de l'intrigue, la force des personnages, l'humilité de l'enquêtrice et l'humanisme qui s'en dégagent séduisent le lecteur accroché au récit dès la première page.
«L'Assassin du premier mai » est le deuxième voelt de la saga Loubry. Il est paru initialement sous le titre « Rancune meurtrière ». Depuis, d'autres aventures mettent en scène cette enquêtrice hors du commun. N'hésitez pas à les découvrir sur le site de l'association ou sur celui de l'auteur.
Extrait du chapitre 1
Soirée du mercredi 30 avril au jeudi 1er mai 1997
Vézelay – Bourgogne
Les coteaux bourguignons acceptaient, soumis, l’emprise de la pénombre envahissante. Un soleil rougeoyant clignait de l’œil, désireux de se reposer après une journée où le labeur de l’homme l’exténuait. Quelques flocons de nuages ensanglantés cotonnaient le ciel de mai naissant. Sur la colline vouée au culte du vin, la basilique Sainte-Marie-Madeleine se dressait, hautaine, souveraine. Les gens superstitieux affirmaient qu’ici, l’air soufflait la foi des croyants en route pour Saint-Jacques-de-Compostelle. Une sorte d’élévation de l’âme, forte, intime, perpétuelle, assurait aux sédentaires d’accéder au Paradis, à la droite du Père. Tant de siècles passés à préserver la magnificence de l’endroit inspiraient respect et silence. Vézelay vivait, au rythme de la congrégation religieuse, sa réputation de petite ville de province tranquille.
Sœur Barbara, franciscaine, se rendait en contrebas d'un chemin bordé de vignes. Elle avait une trentaine d’années. L’aspect sévère de son habit monastique cachait la finesse et la beauté de ses traits ; mais, pour elle, le physique n’avait aucune importance, seule la pureté morale trouvait grâce à ses yeux. Tout en marchant, elle tenait instinctivement la croix suspendue à son cou, protection contre ses démons intérieurs, pensait-elle. Elle songeait aux événements récents. Dans la matinée, l’homme qui, depuis quatre jours, la harcelait, lui avait proposé de la rencontrer discrètement. Ses paroles chuchotées mais empreintes de conviction, accompagnées d’un regard intense et attirant, avaient réussi à la perturber. Un sentiment nouveau, qu’elle refusait d’admettre comme étant de l’amour, s’insinuait en son esprit. Un message se lisait dans ces yeux… Une promesse de l’au-delà ? Si cette enveloppe humaine se déclarait envoyée par le Messie, nul doute qu’elle le croirait sans hésitation ! Le souvenir de sa voix résonnait aux tréfonds de sa mémoire, dans un écho qui faisait trembler tous ses membres ; un timbre vocal qui ne la quittait plus, comme lié à un souffle divin, la couvrant de chaleur, perturbant sa foi et son indéfectible volonté de consacrer sa vie à Dieu. Comment résister à cet appel ? Les questions affluaient, questions interdites pour une moniale. Pourquoi ne pas accepter la tendresse ? Pourquoi ne pas fléchir, rien qu’une fois, à un appel passionné ? Pourquoi ne pas vivre l’instant charnel, sentir le frôlement d’une peau qui la désirait, respirer la chaleur et la caresse d’un baiser à venir ? Pourquoi ne pas oublier, juste un court instant, les préceptes qui l’avaient conduite à bannir les plaisirs ?
Elle parvint à hauteur du chemin qui la conduisait à l’intersection où il lui avait donné rendez-vous. Ce vocable, qu’elle avait ignoré jusqu’alors, prenait une multitude de sens ; galant, anxieux, dangereux, amical, professionnel. Elle se souvenait de rencontres au lycée où, comme ses camarades, elle s’amusait de l’espoir frivole d’amoureux transis dont elle se moquait éperdument ! Combien de garçons avait-elle ainsi blessés ! Sœur Barbara se souvint du billet laissé par l’inconnu lorsqu’elle était rentrée chez elle. Sa lecture ébranla ses certitudes et elle resta de longues minutes dans l’incapacité de réagir. Finalement, elle le rangea dans son journal intime mais les phrases qu’il contenait restèrent gravées dans son esprit. Pourtant, la révolte grondait. Sa vocation l’emporterait sur le désir, mais encore fallait-il que cet homme cesse de l’importuner !
L’air se rafraichît. Elle frissonna. S’armant de courage, elle se rendit vers le lieu indiqué. Alors qu’elle s’en approchait, Barbara s’étonna de la pénombre qui tombait soudainement. L’atmosphère devint moite, lourde. La fraîcheur laissa place à une torpeur inquiétante. La religieuse s’enveloppa de sa cape, croisant les bras comme pour se protéger de la froidure du soir. Elle ne distingua plus rien et se retrouva seule. Elle s’arrêta, décidant de faire demi-tour. Soudain, le regard figé, elle se raidit, un cri s’échappant du plus profond d’elle-même ! Un cri de terreur et de douleur à la fois, qui déchira le silence nocturne ! Une insupportable brûlure irradia son dos ; elle se retint pour ne pas tomber. Instinctivement, ses doigts se portèrent à l’endroit où elle ressentait cette douleur fulgurante. Ils rencontrèrent la froideur du métal qui pénétrait sa chair et se mouillèrent de la chaleur du sang abandonnant son corps. La lame se retira violemment, blessant l’index et l’annulaire. Dans un ultime effort, elle se retourna et aperçut, tel le regard d’un loup à l’orée d’un bois, la haine d’un regard incisif. Elle le reconnut. Sa stature, sa taille, ce visage anguleux, ce ne pouvait être que lui… Il était venu, mais, à cet instant, ce ne fut pas l’être aimé, dont la profondeur d’âme l’avait tant secouée, qu’elle avait devant elle. Au regard haineux et glacial qu’il lui lançait, elle savait qu’il n’y aurait pas de pardon, ni de compassion. Il voulait la voir s’écrouler, la voir souffrir, la voir expirer, et cela plaisait à l’ignoble personnage.
Barbara sentit ses forces l’abandonner. Ses yeux, emplis de larmes et d’incompréhension, ne saisissaient pas les raisons de cette furie meurtrière. Qu’avait-elle fait, pour mériter cette mort atroce ? LlL’assassin, une feuille dans une main, le poignard ensanglanté dans l’autre, porta un coup terrible dans la poitrine de la pauvre nonne, dans un rire sardonique qui trouva écho dans les rangs de vignes alentours. Sœur Barbara eut un dernier soubresaut avant de s’écrouler devant le meurtrier, qui contempla le corps sans vie de sa proie. Dans un geste ironique, il jeta un brin de muguet sur la dépouille.
La Basilique, dont l’ombre se dessinait dans la nuit, ne se dressa plus fièrement. Elle voûtait son dos de vieille femme, témoin muet du drame. Les vitraux paraissaient poreux, emplis d’une brume peu coutumière. Des notes lugubres se firent entendre, plaintes fuyant les pierres séculaires. Comme si l’âme de l’édifice pleurait la perte d’un de ses meilleurs agneaux.
VENGEANCE SECULAIRE
25 Décembre 1995.
Le corps d'un homme découvert noyé dans la fontaine Médicis du jardin du Luxembourg. Une enquête confiée à la gendarmerie dans le secret le plus tacite, mais dans l'urgence la plus décisive. Une femme aussi glaciale que le froid de l'hiver, le Maréchal des Logis Chef Isabelle Loubry : chargée d'une enquête qui va réveiller peu à peu les démons d'un passé endormi, saura-t-elle venir à bout de son propre passé et renaître à la vie ? Auprès d'elle le gendarme William Planquart, qui l'assiste dans ses recherches, a perçu la femme sensible et blessée derrière l'armure d'acier qu'elle s'impose... A eux deux, ils vont tenter de mettre à jour la vérité, celle des faits qui ont provoqué le meurtre, mais aussi celle tout aussi profonde et inextricable de leurs coeurs.
Une affaire inclassable.
Une vengeance à travers un siècle de rancoeur et de douleur.
Un homme et une femme qui cherchent et qui se cherchent...
Un livre dont l'engagement humain, mais aussi militaire et citoyen, dévoile les valeurs essentielles à l'Homme et à la Société.
Valérie-Bérengère Bettelheim
Éditrice et romancière
Extrait chapitre 1
Lundi 25 Décembre 1995 Paris - 00h30
La lune éclaire d’un voile opaque l’allée sur laquelle deux gardes républicains patrouillent. En cette fin décembre 1995, la France se remet doucement des tragiques événements qui l’ont secouée ces dernières semaines. Plusieurs attentats, perpétrés par des terroristes islamiques, ont conduit le gouvernement à déclencher des mesures de sécurité exceptionnelles. La mise en place du plan Vigipirate rassure les Français, surtout les Parisiens !
En cette soirée blanchâtre, Erwan Chanzal et William Planquart, cavaliers de la garde républicaine, effectuent une mission de surveillance dans les jardins du Luxembourg. Revêtus de leur uniforme, les gardes ont été sollicités en renfort pour assurer la sécurité des espaces verts du Sénat ; cette mesure, évidemment, n’est pas du goût de tout le personnel de ce corps d’élite. Erwan n’approuve pas ce service, car pour lui, c’est systématiquement au détriment du travail des chevaux. Il est vrai que, fragilisées par l’inertie, certaines bêtes peuvent être sujettes aux coliques, pouvant occasionner leur décès.
William sort de l’École de Gendarmerie ; il découvre une facette inconnue de ce corps prestigieux spécialisé dans les services d’honneur. Il s’agit là de sa première affectation. Il voulait connaître cette ambiance très axée sur le respect de l’animal et des traditions militaires. Ce milieu lui paraît bien éloigné de l’idée qu’il se faisait de la maréchaussée ; avant son engagement, il ne savait pas qu’un garde républicain était avant tout un gendarme.
Bien déterminé à satisfaire son ambition, William, vingt-neuf ans, fait confiance en ses capacités d’adaptation. De taille moyenne, cheveux bruns coiffés à la coupe réglementaire, le visage rond, son regard franc transpire l’honnêteté et la franchise.
— Tu n’es pas trop crevé ? demande-t-il à son binôme.
— Je serais bien mieux chez moi. Si ça continue, on va trouver un coin pour pioncer.
Le visage de William se crispe. Il ne veut pas succomber aux facilités offertes, elles sont un boomerang qui vous revient en pleine face sans qu’on s’y attende… William respecte son camarade, plus ancien, aussi trouve-t-il une alternative dosée de diplomatie et de bon sens, empreinte d’un peu d’hypocrisie…
— Ce n’est pas une mauvaise idée, seulement le chef de quart tourne dans le jardin. Il vaudrait mieux assurer, n’est-ce pas ? Se faire planter un jour de Noël, c’est plutôt stupide…
— Pas de danger, le chef est occupé à réveillonner tout seul dans son coin ! Mais toi, tu n’es pas fatigué ?
— Non, je ne m’endors jamais avant une ronde de vingt-trois heures. Je préfère assurer la continuité, sinon, j’ai un mauvais réveil. Je dors mieux après. Mais franchement, je ne veux pas te décevoir, le gradé doit certainement prendre son rôle au sérieux. N’oublie pas qu’il y a un général qui commande la sécurité, cela m’étonnerait qu’il tolère une inattention quelconque…
Le vétéran grommelle quelque chose d’incompréhensible et poursuit le chemin.
Un peu plus tard, aux alentours du bâtiment sénatorial, une guérite réchauffe avec peine un fantassin du deuxième régiment d’infanterie de la garde républicaine. Malgré la fraîcheur nocturne, le militaire transpire à grosses gouttes, comme pris par la fièvre. L’approche des cavaliers le fait sursauter.
Date de dernière mise à jour : 30/10/2024